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Mille et une nuits blanches en bonne compagnie de Shéhérazade, à prendre ou à laisser…

Posté sur28/09/2021

« Que de légendes, vraies ou fabuleuses, sont liées aux lointaines contrées de la Perse et au sultan Shahriyar, roi des rois… » Ainsi s’entonne cette adaptation « plaisir des sens » des Mille et une Nuits sensuellement signée par le duo, Trif et Celestini, aux visions et coups de crayons aussi sybarites que vaudevillesques. Comme dans leur Blanche Neige, le tandem, en tournant et retournant avec grâce les situations comiques à l’inverse des aiguilles de la montre de la bienséance, égare avec adresse nos sens dans le labyrinthe de la volupté dans cette plaisante version des Nuits, délicieusement inclinée sur la tolérance.

Parce qu’une femme l’aura trahi avec moult rivaux (la sienne, ça n’est pas rien), le sultan Shahriyar, pour se venger, tuera ses futures épouses après les avoir aimées le temps d’une nuit. Ainsi va le crime passionnel, et l’éternelle déraison liée à la trahison. Ainsi va la maltraitance des femmes au cours de siècles passés qui, aujourd’hui, se vengent à leur tour (Dans la vengeance et en amour, la femme est plus barbare que l’homme, disait Nietzche… L’homme n’a pas fini d’en baver. Juste retour karmique).

Shéhérazade, pour des raisons aussi nocturnes que mystérieuses (que vous découvrirez à la fin du tome 2), va se livrer de plein gré, entre ses mains assassines et lui conter mille et une légendes, que les mauvaises langues mal pendues verront comme des « entourloupes », afin de sauver les belles condamnées de son Empire, quitte à y perdre la vie. Chaque nuit, elle va tenir les sens du sultan éveillés à l’aide d’une imagination chaque fois plus fertile et plus habile, jusqu’à conquérir l’homme dans son entièreté.

On ne sait pas grand-chose sur les origines de ces contes nés au Proche-Orient, encore moins sur son auteur ou ses narrateurs, si ce n’est qu’ils ont été transmis par la voie livresque. Le plus ancien manuscrit connu des contes est un fragment daté du IXe siècle. Les légendes baignent elles-mêmes sous une lumière spectrale… Tant mieux. C’est au XVIIIème siècle, qu’Antoine Galland (orientaliste et auteur français) mettra en lumière dans nos contrées cet univers qu’il aura découvert dans un manuscrit en provenance de Syrie.

Pour André Miquel, historien spécialisé dans la littérature arabe, Les Mille et une Nuits incarnent « toute la littérature possible, du fantasmagorique absolu au réalisme le plus cru ». Tous les genres littéraires s’y retrouvent : le roman, la poésie, la nouvelle, la fable, le fantastique, l’épopée historique, le roman d’amour épistolaire, le roman social, la chronique de la vie quotidienne, le conte érotique (ceux-là nous intéressent particulièrement), le conte moral, le récit de voyage, les brèves de comptoir, jusqu’à l’autofiction…

Perle de la littérature orientale, Les Mille et une Nuits recèle de contes à consonance érotique. A l’envers des légendes se glisse un univers sensuel, un appel des sens assoupis, un érotisme ardent, un hymne à l’amour et non à la haine.

A propos de sensualité, le livre a été attaqué en 2010 pour obscénité par des avocats égyptiens. L’ouvrage encourageant, selon eux, le « vice » et le « péché »… Au vu des censures qui explosent partout dans le monde de concert, le recueil sera-t-il un jour voilé, et confiné dans l’enfer des interdits ? Rien n’est moins sûr.

Laissons les corps et les fantasmes errer en paix…

Heureusement pour nos yeux amoureux, la version de Trif et Celestini est admirablement penchée sur les jolis penchants de Shéhérazade et ses baladins aux mille et un rebondissements. Cette bande dessinée, tout comme les diverses adaptations des Mille et une Nuits, se dévore d’un trait de nuit, cela va de soi, à la lueur d’une bougie, mieux, sous l’éclat d’un croissant de lune, et si possible, en bonne compagnie… Ceci dit, la lecture et ses plaisirs en solitaire ont du bon…

L’appel aux fantaisies est lancée !

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