Fais-le bien et laisse dire : Plus qu’une mise au point sur le scandale des selfies du Parlement helvétique !
Publié le 22/10/2020
Eté 2014, Confédération Helvétique. Un scandale croustillant émoustille la Suisse. Une fonctionnaire publie un Tweet sexy depuis le Palais fédéral. Les journalistes s’emparent du sujet et dévoilent la double vie de cette employée fédérale, mère de famille, libertine avérée et actrice de vidéos pornographiques amateurs jusque-là anonymes. Elle ne répondra jamais aux demandes de la presse bien-pensante ou non, préférant faire le dos rond et espérer que le scandale se dégonflera avec son silence. Tout ce qu’elle veut, c’est qu’on cesse de parler d’elle. Pourtant, 5 ans après avoir été invitée à démissionner, elle décide de raconter comment cette médiatisation effrénée d’un fait anodin, pris entre les rets de la presse, de la politique, et de la morale publique, a été destructeur. Dans ce récit autobiographique, l’employée fédérale déchue nous raconte 20 ans de vie de libertine, cachés et publics, de rencontres étonnantes, d’expériences hors normes, de plaisirs troubles.
LA SUISSE EST UN PAYS CHAUD
(BRUNO CHIRON)
Scandale à tous les étages pour ce témoignage à ne pas mettre entre toutes les mains : son auteure, Adeline Lafouine, propose avec Fais-le bien et laisse dire (éd. Tabou) un document assez exceptionnel à plus d’un titre. Il commence par une affaire dont la Suisse dite « vertueuse » se serait bien passée. Nous sommes en août 2014 lorsque la presse à scandale déniche un selfie sexy posté sur le compte Twitter d’une inconnue, mariée et mère d’un enfant. Elle se fait surnommer Adeline Lafouine. Là où le bât blesse est que la jeune femme est fonctionnaire d’État et que ces clichés dénudés ont été pris dans l’enceinte même du Palais fédéral helvétique. C’est déjà trop pour les autorités suisses qui, sous la pression de l’opinion et surtout de la presse à scandale, décident de licencier une employée expérimentée et très bien notée, mais dont la réputation pouvait ternir la réputation de la confédération helvétique. Rien que ça.
Adeline Lafouine revient sur cet événement qu’elle relate de son point de vue. Elle ne parle pas – et on peut le regretter – du contexte qui l’a amenée à faire le selfie incriminé, mais elle s’attarde par contre longuement sur l’impact vertigineux d’une simple photo qui avait vocation à rester privée. En quelques heures, la jeune femme devient une célébrité malgré elle, et aussi une cible pour des journaux et des sites Internet que rien n’arrête : « Est-ce que la presse a le droit de ruiner la vie d’une employée et mère de famille, uniquement pour remplir les pages d’un journal ? » s’interroge-t-elle. Le choc est rude pour elle et on ne peut que saluer sa capacité à avoir pu affronter cette épreuve. Les 100 premières pages de son témoignage reviennent sur le bouleversement de cette affaire mêlant sexe, moralité publique, réseaux sociaux, liberté et vie privée. Mais Fais-le bien et laisse dire est bien plus que l’histoire d’une femme broyée par la machine de l’opinion : c’est aussi et surtout la confession d’une personnalité hors du commun, comme le remarque d’ailleurs un de ses partenaires dans son livre. Je dis bien « un de ses partenaires » car la suite du livre dévoile la vie sexuelle incroyable d’Adeline Lafouine.
La deuxième partie du document, la plus ahurissante, déploie en effet sur près de 300 pages le parcours d’une Suisse romande devenue une figure du libertinage, jusqu’à être soutenue en toute discrétion par ses admirateurs (car elle est très suivie sur Internet et sur les réseaux sociaux). La plus scandaleuse des Helvètes, résidant aujourd’hui en France, explique « les « pourquoi » et les « comment » » de sa vie sexuelle tumultueuse – et aussi indissociable d’une grande histoire d’amour. Adeline Lafouine a écrit son ouvrage – qui est digne de figurer dans tous les rayonnages de la littérature érotique – à la manière d’une irrésistible montée en puissance, depuis la découverte du libertinage jusqu’aux pratiques les plus extrêmes (BDSM, gang bangs ou tournages de films X amateurs), en passant par la découverte d’Internet, ses rencontres dans des clubs ou des lieux interlopes et ses liens avec son mari et complice. Elle n’oublie pas la naissance de son fils et ses trésors d’inventivité pour le préserver de ses virées nocturnes. L’auteure revient à plusieurs reprises sur les difficultés à assumer à la fois sa carrière professionnelle, sa vie de maman et ses plaisirs : « Une sorte de double vie… Être à la fois la jeune maman et employée modèle, banale et sûrement ennuyeuse dans la vie de tous les jours, et d’un autre côté d’être une femme fatale qui mène une vie sexuelle hors-norme. »
Plus qu’une mise au point sur le scandale des selfies du Parlement helvétique, Fais-le bien et laisse dire est aussi et surtout une longue confession crue, d’une honnêteté à couper le souffle mais aussi regorgeant de scènes que l’on peut qualifier sans exagération de spectaculaires. L’humour est omniprésent dans ce récit, qui est aussi la plongée dans un milieu secret aux rituels souvent très codifiés. Adeline Lafouine ne cache rien au lecteur de ses pratiques, assumant « le grand écart entre le libertinage et le porno » : une vraie sportive de l’extrême, comme elle le reconnaît elle-même. Des regrets, l’ancienne fonctionnaire suisse, clouée au piloris pour quelques selfies finalement bien innocents, n’en a pas. Son leitmotiv ? Vivre librement et s’amuser.
Un livre choc pour un public averti.
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Fais-le bien et laisse... 9782363260819
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