La Déesse : Interview de Nephyla, dessinatrice de « La Déesse »
Publié le 15/09/2016
On parle de BD érotiques cette semaine avec La Déesse, dont le scénario est de Katia Even, les dessins et couleurs de Nephyla. Et je remercie bien chaudement la Librairie La Musardine pour les somptueuses séances de dédicaces qui y sont organisées! Allez-y, ça vaut le coup !
La Déesse, c’est l’histoire d’une jeune femme qui s’ouvre au féminin en elle au travers du talisman magique d’une Déesse païenne de l’amour. C’est chaud, c’est contemporain, on sent plein d’influences nous plonger dans un court voyage initiatique. J’adore la couverture et les dessins de Nephyla, partons à la rencontre de cette dessinatrice, à l’aise avec l’érotisme et super bien dans ses crayons :
Est-ce que c’est ta première BD érotique ?
Nephyla : Techniquement, c’est la première publiée avec une maison d’édition. Mais sinon, j’ai fait de l’auto-publication pendant très longtemps…
Où il y avait des fesses ?
Nephyla : Oh oui! Je ne me gêne pas en général pour dessiner des fesses. Je suis très heroic fantasy aussi dans un autre registre, où je dessine des mecs en grosse tenue qui se battent contre des morts vivants (CF. l’univers de Raxxon et le « Pion Noir » ).
Et tu me disais que tu fais aussi des bandes dessinées pour enfants. Ce n’est pas trop dur de changer d’univers du point de vue de ton image ?
Nephyla : Disons qu’en auto-publication, je fais ce que je veux. J’aborde des univers sombres et plus variés. Par contre, mon style étant très rond, très coloré et du coup, la plupart des éditeurs me cantonnent à de la bande dessinée pour enfants.
Pourtant, « La Déesse » est une BD très réussie !
Nephyla : Oui, parce que Katia connaît mon travail depuis très longtemps et elle est venue me chercher. D’ailleurs je n’étais pas la première dessinatrice qu’elle a démarchée pour celui-ci. Elle me l’a proposé et j’ai dit oui. Et je ne suis pas mécontente du résultat. C’est plutôt plaisant à faire. Mais en fait, historiquement, j’ai commencé mon premier démarchage de maisons d’édition avec un projet érotique – qui a malheureusement échu dans les refusés pour une histoire de style. D’ailleurs pour l’anecdote assez rigolote, j’ai même un éditeur qui à l’époque m’avait envoyé un mail en me disant qu’ils ne prenaient pas de projets pour enfants. Donc, il n’avait vraiment regardé que la couverture.
À ce point-là ? Juste pour le style ?
Nephyla : Juste pour le style et les couleurs.
Alors que justement, c’est plutôt clean et sympa, très avenant…
Nephyla : Merci ! Le côté un peu hybride aussi peut dérouter. J’ai un historique personnel d’influences très internationales : manga, comics… tout. Je ne suis pas typée très franco-belge. On préfère d’habitude un style semi-réaliste plus classique pour faire de l’érotique.
Quand tu dessines tu as conscience d’apporter une touche féminine ?
Nephyla : Je ne sais pas trop comment parler de « touche féminine ». Je fais du dessin, de la BD comme tout le monde. Être un homme, une femme, ou un extraterrestre, je ne crois pas que ça ait beaucoup d’influence sur le dessin.
Vince (dont l’interview est en ligne ici) nous glisse quelques mots en aparté : Si, à mort !
Nephyla : C’est une question de pure perception.
Vince en aparté : En tant que personne, qui tu es, influence forcément ton dessin.
Nephyla : Oui, mais j’aimerai bien qu’on oublie un peu mon sexe. Ça ne constitue pas uniquement ce que je suis.
Tu veux être reconnue pour ton talent, pas parce que tu es une dessinatrice féminine.
Nephyla : En fait, je trouve que la question n’a pas de sens. Mais oui, par exemple, moi, je dessine des corps avec des rondeurs. Je fais des filles avec des volumes. Je suppose que c’est ça ma « touche féminine »
Volontairement ?
Nephyla : Je trouve ça plus charmant à croquer. Quand tu pelotes, c’est quand même plus sympa (elle fait des mouvements circulaires avec ses mains au niveau des seins, sexuellement très appétissants).
C’est vrai, c’est concret. Et quels sont tes futurs projets ?
Nephyla : Je vais continuer à faire de l’auto-publication parce que je reste persuadée que ce que j’ai envie de raconter n’est pas proposable à un éditeur. Ils classent mes projets majoritairement comme sujets de niche.
Comme quoi ?
Nephyla : Mon projet principal en ce moment, c’est de la dark fantasy (Locura) sur le thème du destin avec plusieurs personnages de femmes et d’hommes qui se croisent s’entrecroisent. Dis comme ça à un éditeur, il va trouver ça chiant, alors que toute dépend de la façon dont tu le racontes.
Tu ne veux plus perdre ton temps…
Nephyla : À débattre si mon histoire est vendeuse ou non ? Non. Si je sais que c’est une bonne histoire et que je prends plaisir à la raconter, mes lecteurs le sentiront aussi. Mon premier projet jeunesse, c’était aux éditions Soleil, avec un format hybride entre le manga, le comics et la BD franco-belge, qui s’intitulait « Geek and Girly » avec ma copine Rutile au scénario, qui est une très bonne scénariste, trop méconnue à mon goût (clin d’œil). L’idée, c’était de reprendre les codes de la Rom-Com, du Shoujo et de faire un truc avec du peps. Le héros était un jeune homme qui découvrait la psychologie féminine au travers d‘un jeux dating-sim conçu par des nanas. D’habitude, on part d’un point de vue féminin pour raconter une romance, donc là c’était plutôt l’inverse et c’est ce qui était marrant. Mais ça a été très mal diffusé et placé : les ventes en librairie ont fait un flop malgré le succès sur le net et en festival. Et pourtant on y avait mis tout notre cœur. On a publié deux tomes de cette série. J’ai vécu cet arrêt comme un deuil profond et une fracture entre ma perception et celle de mon éditeur. Donc, maintenant, si je publie une histoire à laquelle je tiens ce sera par mes propres moyens et si ça se foire, je ne m’en prendrais qu’à moi-même !
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- Bandes Dessinées
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